Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Le blog de Eric de Falco

Le blog de Eric de Falco

conseiller général du 1° canton de Rouen


35 h, un bilan finalement positif

Publié par Eric de Falco sur 18 Janvier 2015, 07:51am

Le 1er janvier 2000, la réforme des 35 heures entrait en application. Quinze ans après, l’économiste Eric Heyer, directeur adjoint au Département analyse et prévision de l’OFCE (Observatoire français des conjonctures économiques), dresse un bilan plutôt positif de cette réforme emblématique de la période Jospin.

Quand on regarde les données macro-économiques au moment de la mise en place des 35 heures qu’observe-t-on ? D’abord, une croissance mondiale franche avec un pays, la France, qui faisait mieux en moyenne que la plupart de ses partenaires. Les lois Aubry I en 1998 et Aubry II en 2000 ne changent pas cette situation. Au contraire. Le taux de marge des entreprises ne faiblit pas et les 35 heures vont permettre de redéfinir ce qu’est le temps de travail.

Oui, la loi Aubry II a abouti à redéfinir le travail effectivement réalisé au sein de l’entreprise, en excluant les temps de transport et de pause, etc. Le cas d’école, c’est Eurodisney : avant les lois Aubry, le temps de travail était comptabilisé à partir du moment où l’on pointait à l’entrée du parc. Avec la mise en place des 35 heures, on ne commence à travailler qu’une fois déguisé en Mickey. Ce n’est qu’un exemple, mais cela montre bien que le temps de travail n’a en fait baissé que de 5% et non de 10%. On travaille deux heures de moins, pas quatre. La grande contrepartie des 35 heures, c’était la flexibilité. L’annualisation du temps de travail a, de ce point de vue, représenté un progrès énorme pour les entreprises. Il a permis de réorganiser l’activité, ce qui a généré de très importants gains de productivité.

Certains n’hésitent pas à présenter les 35 heures comme un diktat imposé autoritairement d’en haut. Mais en réalité, cette redéfinition de ce qu’est le temps de travail a été l’occasion d’une remise à plat très féconde. Il n’y a jamais eu autant de dialogue social et d’accords d’entreprise qu’à cette époque. Avec le recul, on sait néanmoins que si les grandes entreprises en ont largement profité et que les cadres ont été les grands gagnants des 35 heures, cela a été plus difficile pour les plus petites.

Le choc, à partir de 2003, c’est en effet la stratégie allemande de désinflation compétitive avec la baisse des salaires et la mise en place progressive de nouvelles règles sur le marché du travail. Mais à l’époque, l’Italie et l’Espagne où il n’y a pas de 35 heures perdent beaucoup plus de parts de marché que la France vis-à-vis de l’Allemagne. C’est vrai, la France n’a pas suivi la stratégie allemande de Gerhard Schröder. Mais c’est justement pour cela qu’elle a fonctionné ! Si tout le monde avait suivi l’Allemagne à l’époque, l’Europe entière se serait retrouvée en récession. Le modèle allemand a marché sur le long terme parce qu’il était unique. Mais cela a été très douloureux.

En 2003, 2004 et 2005, le pays connaît encore une croissance zéro. Ce n’est pas le cas de la France. Une fois le choc des 35 heures absorbé, leur part dans la valeur ajoutée n’a pas augmenté. En réalité, c’est la droite qui, en détricotant une première fois les 35 heures à partir de 2003, a détérioré la compétitivité des entreprises. Rappelez-vous, il y avait alors encore 7 Smic. Lorsque la droite revient au pouvoir à partir de 2002, elle décide de les harmoniser vers le haut d’un seul coup alors qu’il aurait fallu converger beaucoup plus progressivement vers un seul Smic.

Ce fut une catastrophe pour les entreprises passées tôt aux 35 heures. Défiscaliser les heures sup n’est pas forcément une mauvaise mesure. Mais cela a été fait à un très mauvais moment. Avec la crise de 2008, le chômage est très vite remonté. Or si l’on fait de la bonne régulation conjoncturelle du marché du travail, il faut baisser le temps de travail en bas de conjoncture pour limiter les effets de la crise et l’augmenter en haut de cycle, lorsque cela va mieux.

Nicolas Sarkozy a fait le contraire. Il aurait fallu très vite geler cette mesure. Les Allemands, eux, ont fait l’inverse en mettant en place des comptes épargne temps, du chômage partiel, ce qui leur a permis d’amortir les effets de la crise. Il faut une durée légale du travail à partir de laquelle s’enclenchent les heures supplémentaires et les Allemands sont d’ailleurs en train de s’inspirer de la France sur ce point.

Cela me paraît donc une bonne chose que les 35 heures restent la norme. Quant aux accords de branche ou au sein d’entreprises, pourquoi pas, à partir du moment où les partenaires sociaux s’entendent sur une règle commune.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article

Archives

Articles récents