Sarkozy, connu pour la
façon dont il phagocyte ses opposants et saute de gauche à droite, est l’un des esprits politiques les plus fins de sa génération. On ne peut en dire autant de sa compréhension de la chose
économique. L’an dernier, du fait d’un contexte un peu fou, le problème était passé inaperçu. Au paroxysme de la crise financière, les leaders de tous les pays du monde se livraient à une
débauche d’interventionnisme, de transgression des règles, de plans de sauvetage, de dépenses incontrôlées — en bref, jouaient les
Français.
Avec le retour progressif à la normale, chaque pays va devoir affronter un surcroît de pressions pour un retour à plus de discipline. Cela pourrait constituer un problème pour Sarkozy, qui a pour
habitude de soumettre l’économie aux caprices de ses propres impératifs politiques. La France fut l’un des premiers pays à émerger de la récession, grâce à son épais matelas de dépenses publiques. Mais ce faisant, le pays a accumulé une dette importante, et les modalités de son remboursement sont loin d’être claires.
Aujourd’hui, les bonnes vieilles habitudes françaises avec lesquelles Sarkozy avait promis de rompre, et les astuces de campagne qu’il a concoctées, risquent d’alourdir plus encore la charge qui
pèse sur la deuxième économie européenne.
Premier souci : le Grand Emprunt, un super-emprunt d’Etat de plusieurs milliards d’euros destiné à financer des investissements de long terme, et qui doit être adopté en décembre. Selon Sarkozy, il doit aider à préparer l’économie pour l’avenir, dans un pays où le déficit chronique (qui court depuis 1974) laisse peu de marge pour préparer le futur. L’emprunt ne fera que creuser plus encore le trou du pays, sans clair bénéfice à espérer. Ce Grand Emprunt, qui a pris tout le monde de court à son annonce en juin dernier, a été introduit sans trop de précisions principalement dans le but de dérouter et de déstabiliser son opposition.
En 2007, Sarkozy a remporté les élections en promettant une "rupture" avec le passé, par le biais de réformes jusque-là toujours différées du marché du travail et de la protection sociale. Il a semblé initialement qu’il disposait de l’énergie et du talent nécessaire à les faire aboutir. Aujourd’hui, force est de constater que la stratégie politicienne du Président nous mène droit dans le mur et que la « rupture » n’était qu’un mot.