Intervention d’Eric de Falco, Conseiller Général du 1er Canton de Rouen
8 décembre 2011
Le Havre – Docks Café
Cette journée dont les thèmes retenus ne sont certes, de l’aveu même de nous tous, pas nouveaux exigent de nouvelles réponses.
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A commencer tout d’abord par une nécessaire réorientation de l’esprit des politiques publiques insufflées au niveau national lorsqu’il s’agit de parler de prise en charge psychiatrique.
Nous avons en effet, dans les derniers mois, eu souvent à constater que la question des soins psychiatriques était avant tout abordée sous un angle sécuritaire plus que sanitaire avec la réforme de la loi du 27 juin 1990 qui opère une révision du dispositif de l’hospitalisation sans consentement et sur demande d’un tiers.
Je ne m’attarderai cependant pas longuement sur cette question, puisque celle-ci sera traitée cet après-midi en présence du rapporteur de la loi, et du fait qu’elle a tout de même permis des avancées sur un certain nombre de points déjà évoqués en 2007 lors des consultations des acteurs du secteur
Cependant et je crois nécessaire de le rappeler, nous disposons dans notre pays d’une politique de secteur qui est enviée avec une responsabilité continue du patient pour les praticiens.
Cette continuité se heurte parfois à la problématique des équipements et donc de la couverture territoriale en offre de soins psychiatriques ; A ce titre, et si mes souvenirs sont bons, une étude de la DREES[1] d’il y a quelques années, faisait apparaître que notre département se trouvait dans la fourchette basse du nombre d’habitants couverts par un psychiatre[2]. La Seine-Maritime se trouvant toutefois dans une meilleure situation que celle du département voisin de l’Eure[3].
Et concernant le nombre de lits et places d’hospitalisation en psychiatrie, le ratio était également assez faible pour notre département, entre 114 et 146 lits et places pour 100 000 habitants et moins de 114 pour nos voisins de l’Eure.
L’offre de soin n’est pas une fin en soin, encore faut-il que celle-ci soit conjuguée à une formation adéquate. Cela vaut tant pour le personnel en relation directe avec les malades, surtout dans le cadre de soins sans consentement. A ce titre on peut regretter la disparition de la spécialisation possible des infirmier(e)s en psychiatrie. Les personnels des établissements sociaux ou médico-sociaux peuvent, eux aussi, être confrontés à des usagers atteints de pathologies relevant d’une prise en charge psychiatrique.
Cette formation elle sera, de toutes les manières, nécessaire dans un second temps celui de l’insertion qui passe, notamment, par le développement d’alternatives à l’hospitalisation.
En effet face à la problématique des sans-abris, des jeunes en errance ou des jeunes qui relèvent de notre responsabilité, par exemple au titre de l’aide sociale à l’enfance, la mise en place d’un parcours d’insertion doit pouvoir se faire « hors les murs ».
Il va donc de notre responsabilité de construire une collaboration étroite entre professionnels de la santé et du social. Le secteur, dans son ensemble, doit se mobiliser pour être en adéquation avec les spécificités que supposent le traitement de ces populations fragiles, jeunes, sans-abris, personnes âgées ou en situation de handicap, lorsqu’elles présentent des troubles psychiatriques.
De nombreuses initiatives sont en cours pour répondre à ce besoin de nouvelles solutions.
Par exemple, la mise en réseau des partenaires institutionnels, associatifs, de santé, pour décliner le travail de soin de l’hôpital aux établissements ou encore à domicile.
Par exemple, des dispositifs novateurs comme les appartements thérapeutiques dont l’objectif est avant tout la réinsertion sociale effective mais qui mobilisent un nombre élevé de personnels soignants.
Par exemple, des ateliers thérapeutiques qui re-socialisent, autonomise et ré-entrainent à l’exercice d’une activité professionnelle préalable nécessaire à une insertion complète et totale dans la vie de la cité.
Par exemple enfin des appartements associatifs et des maisons communautaires où les patients peuvent assumer eux-mêmes, en autonomie, les tâches quotidiennes de la vie avec toutefois une garantie de suivi médical opérée par les équipes soignants à domicile.
Ces initiatives sont des nouvelles réponses qui viennent conforter l’action déjà menée dans ce cadre des soins portés « hors les murs » comme au travers de l’hospitalisation à domicile et de l’unité mobile d’action psychiatrique pour personnes précarisées du Centre Hospitalier du Rouvray.
Elles restent toutefois conditionnées à la réussite d’autres défis tout aussi importants pour garantir une effectivité des soins psychiatriques pour personnes précarisées.
Tout d’abord la question de la gestion des urgences en psychiatrie et là je me tourne vers M. le Directeur de l’ARS qui mènera ce travail d’organisation du dispositif de réponse aux urgences psychiatriques avec tous les partenaires institutionnels
La question du suivi et de la réinsertion des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques sans consentement sous une forme alternative à l’hospitalisation qui mobilisera, autour d’un partenariat dynamique – sous forme de conventions - , les directeurs d’établissements, le représentant de l’Etat dans la région, les collectivités territoriales ainsi que le directeur général de l’ARS.
Et enfin la question, ô combien importante, du changement de regard sur les personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et sur les soignants, bien trop souvent caricaturées dans des stéréotypes qui, s’ils ne reflètent pas du tout la réalité, créent tout de même un frein dans l’action publique et empêchent, disons le clairement, la recherche et surtout la mise en place de nouvelles solutions.
Mesdames, Messieurs, je ne voudrais toutefois pas conclure sur une note qui pourrait paraître peu optimiste. Au contraire, je crois profondément à l’échange et à l’émulation et quoi de mieux que la journée qui nous réunit aujourd'hui pour laisse libre cours à ceux-ci ?
Je vous remercie.