Titre :
La Peur du déclassement. Une sociologie des récessions
Auteur : Éric Maurin
Éditeur : La République des idées, Le Seuil, 96 pages, 10,50 €
Le livre
La peur du déclassement est en train de devenir l’énergie négative de notre société. Pourtant, explique Éric Maurin, il y a bien plus d'imaginaire que de réel, bien plus de craintes que de faits avérés dans cette angoisse commune.
Dureté et rareté du déclassement constituent en fait les deux faces de la même pièce : plus les statuts sont protégés, moins on les perd facilement, mais quand on les perd, on perd plus. En réalité, le déclassement n’est guère plus important aujourd’hui qu’il ne l’était il y a trente ans. Pour preuve, si l'on compare deux récessions, celle de 1993 et celle de 2008, on ne voit pas d'accentuation notable des licenciements comme cause d'entrée au chômage explique l’auteur. Parmi les jeunes sortis de l'école depuis moins de cinq ans, 7 % des diplômés du supérieur étaient au chômage en 2008 (contre 47 % de non diplômés !), pas plus qu'en 1981 et plutôt moins qu'en 1987 (10 %), bien qu'entre-temps, leur nombre ait presque triplé suite à la démocratisation de l'accès aux études supérieures.
Pourtant, les périodes de récession sont des moments où s’approfondit le fossé entre tous ceux qui luttent contre la remise en cause des protections anciennes et ceux pour qui s’éloigne soudain toute perspective d’intégration sociale. Les travailleurs ont peur de perdre leur emploi, les jeunes de ne pas en trouver – échouer à l’école n’a ainsi jamais été aussi disqualifiant, les jeunes fonctionnaires, très souvent surdiplômés, ont peur de voir leurs avantages statutaires rognés… Comment réduire cette peur de tout perdre ? Pas en supprimant les statuts protecteurs, répond Éric Maurin, mais en réduisant les inégalités qu'ils engendrent.
Auteur
Éric Maurin, économiste et sociologue français, est directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) et professeur à l’École d’économie de Paris.