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Le blog de Eric de Falco

Le blog de Eric de Falco

conseiller général du 1° canton de Rouen


La vraie menace

Publié par Eric de Falco sur 4 Juillet 2013, 06:11am

Catégories : #politique nationale

Au sein du FN, en avril, le choix a été vite fait. Marine Le Pen, son père et la dizaine d'autres membres de la commission d'investiture étaient d'accord sur le profil du candidat qu'il fallait présenter dans les terres de Jérôme Cahuzac. Plutôt que la militante historique, une quinqua pied-noir, ils ont voté et choisi de lancer dans cette bataille qui s'annonçait hautement médiatisée un étudiant en BTS de 23 ans au profil de gendre idéal et fils d'un notable local, Etienne Bousquet-Cassagne. Place à la jeune garde !

Le résultat de leur poulain dimanche 23 juin - une défaite mais avec 46% des voix au second tour, soit 20% de plus qu'au premier - a validé ce pari et nourrit désormais les espoirs du Front pour les prochaines municipales. Car "le petit Bousquet-Cassagne" n'est pas qu'un coup médiatique. Il est l'arbre qui cache une forêt de jeunes pousses - souvent masculines - que le parti s'apprête à lancer dans l'arène pour 2014. Au FN, on ne milite pas que pour la préférence nationale, on applique aussi la "préférence jeunes".

 Il n'y a qu'à regarder ce qui se trame aux alentours d'Hénin-Beaumont, dans le Pas-de-Calais, le laboratoire de Marine Le Pen depuis des années. Les futures têtes de liste aux municipales ?  Des étudiants en droit ou en langues, un ingénieur ou un conseiller financier junior, séduits par "Marine" A Lens, Kévin Goslin, étudiant de 20 ans qui entre en master d'enseignement à la rentrée, n'est adhérent que depuis un an et n'a jamais été candidat.

 Il vient pourtant d'être choisi pour tirer la liste frontiste dans cette ville où le FN n'a aucun élu municipal. Il est loin d'être une exception dans le département : son copain Ludovic Pajot, 20 ans, étudiant en droit, sera chef de file à Béthune, Antoine Golliot, ingénieur de 28 ans, est investi à Boulogne-sur-Mer, et Anthony Garénaux, étudiant en droit de 22 ans, à Harnes (12.000 habitants). A côté, les trentenaires en lice à Arras et à Saint-Omer passent presque pour des doyens.

La "carte jeunes" joue aussi à plein en Lorraine, autre terre frontiste : plutôt qu'un militant chevronné de 65 ans, c'est un étudiant en droit - encore un - de 22 ans, Pierre Ducarne, qui est tête de liste à Nancy. Cerise sur le gâteau : malgré son jeune âge, il incarne l'ouverture puisqu'il a déjà été membre du petit parti de Dominique de Villepin. Dans la plus modeste cité de Thaon-les-Vosges (8.500 habitants), Jordan Grosse-Cruciani fêtera ses 23 ans à la rentrée. Lui aussi est l'une de ces nouvelles recrues du "marinisme" : fils d'un cheminot et d'une mère d'origine italienne et communiste, l'étudiant en master de sciences politiques a milité à l'UDF et soutenu Bayrou avant de prendre sa carte le 2 mai 2011, séduit par son premier défi lé bleu-blanc-rouge, la veille à Paris. L'an dernier, il avait déjà été propulsé aux législatives (15%). Pour 2014, il a été préféré à "une personne de l'ancien Front" âgée de... 55 ans.

 

 

 

 

 

Une subite fièvre jeune ? Ce tropisme n'est pas si nouveau au Front, qui n'aime rien tant qu'exalter les passages de flambeau et se prétend depuis les années 1990 premier parti des jeunes. Jean-Marie Le Pen porte depuis longtemps un regard attendri sur les nouvelles générations. Son propre père n'avait-il pas été le plus jeune conseiller municipal de La Trinité-sur-Mer ? Lorsqu'il présidait encore aux destinées de son parti, n'avait-il pas permis au Front national Jeunesse, en 1998, d'investir en grande pompe pour les régionales une centaine de jeunes ? N'avait-il pas couvé l'ancien coordinateur du FNJ, David Rachline, devenu plus jeune conseiller municipal à Fréjus en 2008 ?

 

En 2012, c'est toujours le vieux chef de clan qui a convaincu sa petite-fille de 22 ans, Marion Maréchal-Le Pen, de se lancer aux législatives à Carpentras. Raison invoquée : il faut montrer l'exemple à la jeune génération !

 

Préparer l'avenir sur le terrain

 

Mais, avec l'arrivée de sa fille à la tête du FN, l'affaire a pris une autre ampleur. D'abord parce que les moins de 30 ans sont légion au Front, souvent séduits par "l'effet Marine". Ils représenteraient désormais 27% des 66.000 adhérents revendiqués par le parti. Pas étonnant que le mouvement présente des candidats collant à son électorat et à ses militants. Surtout, à la différence de son père, la présidente du FN a su donner à ce choix un tour stratégique. Et pas seulement pour incarner le changement à travers de nouveaux visages. Pour Jean-Marie Le Pen, il fallait faire des coups. Pour sa fille, il faut préparer l'avenir, sur le terrain.

 

C'est tout le plan de Marine Le Pen et de son équipe : propulser une génération "bleu Marine", moins destinée à gagner des villes dès 2014 qu'à devenir les futurs cadres du parti, sachant mailler tout le territoire. L'ex-candidate à la présidentielle estime cette étape nécessaire à la conquête du pouvoir. Secrétaire général du Front et artisan de l'implantation de Marine Le Pen à Hénin-Beaumont, Steeve Briois le répète à ses troupes : "Il faut en moyenne dix ans pour s'implanter durablement et efficacement au sein d'une ville."

 

"Pas seulement des investitures, des investissements"

 

Lui n'en avait que 15 quand il a commencé à tracter dans les rues de la cité minière du Pas-de-Calais avant d'être tête de liste aux municipales à 23 ans. Avec son camarade Nicolas Bay, passé comme lui par l'école mégrétiste qui cherchait à former des cadres, il a fait le tour des fédérations frontistes pour "détecter de nouveaux talents". Les plus prometteurs ont été promus secrétaires départementaux, d'autres lancés aux législatives, les derniers jetés dans le bain pour mars prochain. "Sur nos 500 têtes de liste déjà choisies, on a énormément de jeunes entre 23 et 28 ans, assure Nicolas Bay, responsable national de la campagne des municipales. Ce ne sont pas seulement des investitures, ce sont des investissements."

 

Dans ce travail de fourmi, les sergents recruteurs du Front ont eu une heureuse surprise. "Ces jeunes présentent bien, raconte Bruno Bilde, membre du bureau politique. Ils veulent en découdre et se sont autoformés à la politique. Avant il fallait épauler nos candidats. Eux maîtrisent la communication, savent monter un site internet..."

 

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