En quittant l'Afghanistan, Bernard Bajolet l'ambassadeur de France sortant, a remisé la langue de bois au placard et a critiqué le calendrier de la transition politique et militaire en Afghanistan.
"Je n'arrive toujours pas à comprendre comment la communauté internationale et le gouvernement afghan sont parvenus à cette situation où tout doit se passer en 2014 : les élections, un nouveau président, les transitions économique et militaire, et tout cela alors que les négociations pour le processus de paix n'ont pas encore vraiment commencé", a déclaré M. Bajolet lors d'un discours d'adieu mardi à l'ambassade, remettant parfois en question les réalisations dans ce pays de la communauté internationale.
M. Bajolet, qui a été nommé à 63 ans à la tête des services secrets français, faisait notamment référence au départ de l'essentiel des troupes de l'OTAN, qui doit se dérouler la même année que l'élection d'un successeur au président Hamid Karzaï. L'organisation Al-Qaida "a été sérieusement affaiblie, mais sans doute moins par notre présence militaire en Afghanistan que par les pertes qui lui ont été infligées de l'autre côté de la frontière, notamment avec l'élimination de Ben Laden en mai 2011", a-t-il dit en référence au Pakistan, accusé de servir de base arrière aux talibans afghans.
Selon M. Bajolet, les pourparlers de Chantilly en décembre dernier ont "montré que la plupart des Afghans veulent la paix, y compris une partie des talibans". "Tous devraient saisir ce moment (...) et laisser de côté leurs intérêts personnels", a-t-il dit.
L'un des principaux défis à relever pour Kaboul est, selon lui, la lutte contre la corruption, qui est notamment "due au fait qu'une grande partie de l'élite a perdu foi dans l'avenir de son propre pays". "L'Afghanistan progresse rapidement pour retrouver sa souveraineté en matière de sécurité, mais il n'y aura pas de souveraineté effective tant que l'Afghanistan sera dépendant financièrement" de la communauté internationale, a souligné M. Bajolet.
Il a estimé que ce pays doit augmenter ses recettes douanières, "en baisse" en raison du "détournement d'une partie d'entre elles", et "moderniser son système fiscal".