Le président de la République s'est livré, hier soir, à un exercice dans lequel il excelle: faire des annonces. «On
supprimera la taxe professionnelle en 2010 parce que je veux que l'on garde des usines en France», a notamment expliqué le chef de l'Etat. Interrogé sur le coût de cette mesure, il a avancé
le chiffre de 8 milliards d'euros. Un montant bien éloigné de ce que versent réellement les entreprises au titre de la taxe professionnelle: 25,5 milliards d'euros en 2006, selon la Commission
permanente de concertation pour l'industrie (CPCI).
A la mi-journée, le ministère des Finances a confirmé et détaillé le chiffre de 8 milliards. Selon Bercy, l'Etat «prend déjà à sa charge 12 milliards d'euros au titre de dégrèvements».
Resteraient donc 11 milliards d'euros à la charge de l'Etat. Celui-ci attend de la réforme une hausse «mécanique» de 3 milliards d'euros de l'impôt sur les sociétés. «Ce sont donc
bien 8 milliards d'euros que l'Etat devra trouver pour compenser la suppression de la taxe professionnelle», conclut-on dans les services de Christine Lagarde. On croit rêver avec ces
explications alambiquées qui sont révélatrices de la méthode Sarkozy. Quoi qu'il en soit, la suppression de la taxe professionnelle ne sera pas totale. La part des équipements et des biens
matériels sera supprimée (80% de la taxe professionnelle, soit 23 milliards d'euros). Dans un communiqué, la commission des Finances de l'Association des maires de France avait indiqué que la
taxe professionnelle représente 28 milliards d'euros et non huit. «Environ 10 milliards sont d'ores et déjà payés par l'Etat au titre des dégrèvements; En cas de suppression, il resterait 18
milliards d'euros à trouver, et non 8 milliards», a-t-elle souligné.
Mais au-delà de ces interrogations sur les montants, d'autres questions subsistent, notamment sur le bien fondé économique d'une telle mesure.
C'est un bel effet d'annonce, mais ce n'est que du marketing politique. Présenter la suppression de la TP comme un moyen de lutter contre les délocalisations, c'est bien plus vendeur aux yeux de
l'opinion.
La fiscalité, et en particulier la TP, ne joue qu'à la marge sur les choix de localisation. Il y a d'autres déterminants
plus importants pour les entreprises, comme la demande sur un marché, ou le coût de la main d'œuvre. La France est le deuxième pays de l'Union Européenne qui reçoit le plus d'investissements
étrangers (derrière le Royaume-Uni). Les entreprises viennent y chercher une localisation stratégique, au cœur du marché européen, mais aussi des savoir-faire, des compétences.
Une étude de l'Insee en 2005 montrait que les délocalisations ne représentaient que 10% des emplois détruits dans l'année, soit environ 13.500 postes.
Dans certains cas, les délocalisations sont assez inévitables. L'enjeu n'est pas de les interdire, mais
d'accompagner les gens qui perdent leur emploi.
La suppression de la TP va poser
d'énormes problèmes aux collectivités locales. Selon le rapport Fouquet de 2004, la TP constitue 16% des ressources des collectivités locales. La taxe carbone évoquée pour remplacer la taxe
professionnelle va cibler les secteurs polluants, notamment les bassins industriels, déjà les plus touchés par la crise. Elle risque donc de porter sur les entreprises les plus délocalisables,
l'inverse de l'effet recherché. Autre aspect: si la taxe carbone fonctionne bien et si les entreprises s'efforcent de diminuer leur pollution, cela va réduire les rentrées fiscales pour les
collectivités locales.
En tous cas, rien n’est annoncé pour améliorer immédiatement le pouvoir d’achat des plus démunis, ce qu’attendaient les Français. Rien sur les salaires, rien sur la TVA qui est réellement l’impôt le plus injuste. L’idéologie la plus absurde reste l’obsession maladive du Président. Dommage…..