On se souvient que le général de Gaulle, avait la réputation de payer de sa poche les timbres pour ses correspondances personnelles. On connaît moins bien une autre histoire de timbre, moins morale. Il n’y a pas si longtemps, existait une curieuse tradition dans notre pays.
Pourquoi ce rappel d’une histoire récente ? Parce que ces dernières semaines, l’actualité a été émaillée de questions sur la situation des ministres et des ex-ministres au regard de leur niveau, des avantages annexes et des conditions de cumul. Ce n’est pas la première fois. Cette question revient périodiquement, à l’occasion de telle ou telle situation jugée plus choquante qu’une autre ou mise en lumière de manière plus violente. Est-ce que cela peut-être l’une des dernières fois ?
Il est difficile d’aborder cette question sans être tout de suite taxé de démagogie, de populisme ou pire d’être considéré comme un donneur de leçon. Essayons d’aborder cette question calmement et sans que cette tentative soit interprétée comme un jugement à l’égard de tel(le) ou tel(le), mais bien comme une contribution destinée à faire progresser le sujet
Est-ce démagogique d’aborder ce sujet ? Pour moi, la réponse est nettement non. Une démocratie doit comporter des règles claires pour la rémunération de ses dirigeants. . Et des citoyens ont le droit de savoir combien perçoivent leur maire, leur conseiller général, leur député, leurs ministres. Et ils ont le droit d’avoir un point de vue sur le sujet. Les responsables politiques sont en général moins bien payés que les dirigeants du secteur privé. C’est vrai. Et alors ? Il ne s’agit pas de dire qu’ils sont les mieux payés ni de nier que certains d’entre eux ont renoncé à une carrière plus lucrative, parfois bien entamée, pour préférer, avec des revenus moins élevés, servir l’intérêt public. Tout cela n’empêche pas d’en parler, ni de pouvoir souhaiter des règles claires.
Le premier principe est un principe de transparence. Il n’y a aucun inconvénient à pratiquer la transparence, sauf si on a honte de ses revenus, ou s’ils ne sont pas acquis régulièrement. Il serait logique de connaître la totalité des revenus de celui qui exerce un mandat public. La rémunération liée directement à l’exercice d’un mandat ou d’une fonction bien sûr. Mais également les revenus qui peuvent leur être indirectement rattachés. Ainsi, il serait normal de connaître l’usage que les parlementaires font des sommes qui sont mises à leur disposition, en complément de leurs indemnités.
Le deuxième principe est le principe de lutte contre les conflits d’intérêts. On a beaucoup épilogué sur les conflits d’intérêts des experts, notamment à propos de la vaccination contre la grippe. Les responsables publics et singulièrement les responsables politiques devraient se voir appliquer une conduite de prévention des conflits d’intérêts. La transparence en est une condition, c’est pourquoi elle est indispensable.
Le troisième principe est de tendre le plus possible vers le droit commun. Difficile d’aborder la question de l’allongement de l’âge de la retraite et de la durée de cotisation si ceux qui votent la loi sont soumis à un régime éloigné du droit commun et qui ne serait pas affecté par des changements de règles qui s’appliquent à tous les salariés. Mieux vaut une rémunération dont le montant soit connu et qui soit soumis aux mêmes règles que les autres pour la fiscalité, pour les cotisations sociales et pour les droits à la retraite.
Le quatrième principe concerne l’évolution de ses revenus. On s’est interrogé sur le fait de savoir s’il fallait baisser les rémunérations des ministres. Ce à quoi il est répondu en général qu’elles ne sont pas plus élevées que celles qu’on observe dans d’autres pays et, à nouveau, que mêmes au sein de la sphère publique, les ministres ne sont pas forcément ceux qui ont les plus hautes rémunérations. Tout cela est vrai, mais intervient, nous semble-t-il, un autre facteur. Personne ne peut nier la question de l’exemplarité.
Voilà quatre principes, certainement perfectibles, que l’on pourrait proposer et dont on pourrait débattre. Sans trop traîner. Car l’opacité et la confusion laissent toujours des traces durables et profondes, qui elles sont dangereuses pour la démocratie. Et cela ne veut pas dire qu’il faut limiter la réflexion aux responsables politiques. Dire cela, ce n’est pas occulter la question des hautes rémunérations dans les entreprises ou dans le sport. Et traiter l’une n’empêche pas de traiter l’autre. Bien au contraire.