Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Le blog de Eric de Falco

Le blog de Eric de Falco

conseiller général du 1° canton de Rouen


Le tombeau de la politique?

Publié par Eric de Falco sur 25 Août 2010, 07:27am

Catégories : #politique nationale

 

Il y a un dictat du politiquement correct, du « penser correct » et du « dire correct », dictat qui biaise le débat parce qu'on s'affronte sur la forme au détriment du fond, comme s'il fallait mouler le fond dans un formatage acceptable, et qu'à cette unique condition, toute idéologie, et cette fois le terme ne semble pas inexact, peut advenir sur la scène publique. Mais d'un autre côté, attaquer la « bien-pensance » en prétendant « parler vrai » relève de la même hypocrisie. Le « parler vrai » ne recouvre pas une réalité de pensée, peut-être permet-il d'exprimer une émotion, une réaction, une colère, et pourquoi pas la haine, la violence verbale, mais jamais une pensée élaborée, sans quoi pourquoi aurait-elle besoin de cette caution du « parler vrai » - sa construction, sa logique interne, sa légitimation propre devrait pouvoir s'en passer. Ainsi le parler vrai comme la bien-pensance sont deux modes de langage, mais pas de pensée, et consacrent le règne de la communication d'où les idées ont déserté.

 

Lorsque Xavier Bertrand fustige « les faux experts et les associations de bien-pensants », pour défendre le projet de loi visant à déchoir de sa nationalité un délinquant d'origine étrangère, on comprend qu'il utilise là une stratégie éprouvée pour faire passer ses propres idées : renvoyer toute opposition à une proposition de loi à de la « bien-pensance », c'est inscrire la proposition de loi dans une logique de parler vrai. Mais on peut tout aussi bien renvoyer dos à dos ces deux types de rhétorique, qui ont pour finalité de faire oublier le fond du problème.

 

Lorsque ce même Xavier Bertrand brocarde les socialistes et leur supposée position sur la sécurité par ces mots « Jamais nous ne cèderons un pouce de terrain à la violence, à l'ultra-violence », il sous-entend que les partis adverses seraient tout à fait ouverts à cette possibilité. Mais qui peut croire que qui que ce soit, de gauche comme de droite, accepte l'ultra-violence ? Qui peut croire que socialistes, communistes, ou autres, n'ont qu'une idée en tête, tolérer l'ultra-violence par anti-racisme ? Car c'est bien là le raccourci que l'UMP attribue à l'opposition : eux sont contre la violence, les autres l'acceptent. Non sens que tout cela. S'il y a opposition, c'est sur la manière de l'enrayer : c'est-à-dire des propositions politiques ; par quel syllogisme a-t-on pu transformer l'opposition sur les moyens en opposition sur les fins ?

 

Ainsi, critiquer toute proposition du gouvernement s'apparenterait tantôt à de la naïveté, tantôt à de la « bien-pensance », argument facile pour se débarrasser du débat d'idées. De l'autre côté, il est vrai que l'opposition se réfugie parfois facilement derrière une indignation inféconde. Car il ne s'agit pas d'opposer la morale à la politique, mais de faire de la politique sans oublier les valeurs qui la fondent. L'angélisme et les parangons de vertu nuisent au débat, mais le racisme décomplexé l'empêche. Comment faire, alors, pour redonner vie au débat d'idées ? Comment dire que stigmatiser les délinquants d'origine étrangère, parce qu'ils sont d'origine étrangère et non parce qu'ils sont délinquants, devrait être mis en question, tout au moins soumis à l'examen, sans passer pour un bien-pensant hypocrite ? Comment poser la question d'une différence qui semblerait essentielle aux yeux du gouvernement entre délinquants d'origine étrangère et délinquants français, comme s'il existait une délinquance fondamentalement et  intrinsèquement liée à l'origine étrangère sans passer pour un anti-raciste bégueule et ridicule ?

 

Oui le débat est faussé par ces nouvelles stratégies de discours, et ce tour de passe-passe que permet la communication en politique, a réussi à étouffer toute émergence de dialogue au sens socratique du terme et à faire passer des idées, qui sans leur fard, montreraient leur vrai visage...

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article

Archives

Articles récents