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Le blog de Eric de Falco

Le blog de Eric de Falco

conseiller général du 1° canton de Rouen


Le droit des malades, avant tout

Publié par Eric de Falco sur 6 Juin 2012, 23:00pm

Catégories : #actualité

Conformément aux exigences du Conseil constitutionnel, la loi du 5 juillet 2011 a instauré un contrôle systématique par le juge des libertés et de la détention des mesures d’hospitalisation complète résultant d’une admission en soins psychiatriques sans consentement.

Cette intervention  du juge pour vérifier la régularité et le bien fondé d’une mesure privative de liberté constitue un progrès nécessaire et attendu pour les droits des malades.

Mais l’on ne peut prétendre à une réelle amélioration des droits et de la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques que si ce contrôle s’exerce de manière effective  et dans des conditions respectueuses de la dignité et de la sécurité des malades.

Or, la situation, plus de huit mois après l’entrée en vigueur de la réforme, est loin d’être satisfaisante …

Près de 75 % des audiences (selon les statistiques transmises par le ministère après six mois d’application de la loi) se tiennent au tribunal dans des conditions d’accueil et de sécurité souvent déplorables – délais et conditions matérielles d’attente incompatibles avec l’état de santé des personnes concernées, promiscuité regrettable avec les prévenus ou gardés à vue, salles d’audience inadaptées, etc.

Cette situation est dénoncée par la commission des affaires sociales de l’assemblée nationale dans un rapport d’information relatif à la mise en œuvre de la loi déposé le 22 février 2012 qui relève que "quand les patients sont transportés au tribunal, les conditions matérielles d’accueil sont rarement adaptées et ne présentent pas toujours des conditions de sécurité suffisantes" et constate que cette expérience peut se révéler traumatisante pour le patient, ce que confirment de nombreux soignants.

 

Lorsque ces audiences ont lieu au tribunal, il est par ailleurs avéré que de nombreux malades n’y sont pas conduits, un certificat médical s’y opposant "dans leur intérêt" ; le taux de non-présentation serait ainsi de l’ordre de 40 à 45 % en région parisienne et atteindrait même 100 % pour certains établissements !!

Cette situation n’est pas acceptable : il est en effet ainsi procédé, de plus en plus souvent, à un simple contrôle « sur dossier » ; la personne hospitalisée sans son consentement se trouve privée, pour des motifs fallacieux, de son droit légitime de rencontrer le juge chargé de contrôler la mesure qu’elle subit et de pouvoir faire valoir ses observations ; d’autant que, dans ces conditions, elle n’aura souvent pas eu de contact avec l’avocat chargé de la représenter, saisi tardivement.

 

La Commission nationale consultative des droits de l’homme, dans un avis sur les premiers effets de la réforme adopté le 22 mars 2012, rapporte, quant à elle, également qu'il "est ressorti des auditions menées que l’audience à l’hôpital, qui évite une promiscuité regrettable entre malades et délinquants dans les couloirs du palais de justice, garantit l’effectivité du contrôle et que son principe devrait être la règle......s’il est hautement souhaitable que la justice soit normalement rendue dans les palais de justice, une exception semble justifiée s’agissant de malades, à condition de doter les juridictions des moyens permettant aux juges de se déplacer dans les hôpitaux".

 

Nous n’ignorons pas que cette réforme a bouleversé considérablement l’activité des juges des libertés et de la détention dans ce domaine (plus de 30 000 saisines en six mois selon le bilan statistique établi parle ministère) ; l’étude réalisée en janvier 2011 évaluait d’ailleurs l’impact de cette réforme sur les effectifs à 80 ETP de magistrats et 60 ETP de greffiers ; elle préconisait également un abondement du budget de l’aide juridictionnelle en conséquence. Les moyens nécessaires à une mise en œuvre effective du contrôle se font attendre et la mission de l’avocat est rémunérée par 4 UV (soit moins de 100 €), ses éventuels frais de déplacement n’étant pas pris en charge …

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